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Le refrain est connu : « Dans la nuit de samedi à dimanche, à 3 heures, il sera 2 heures ! » Le passage à l’heure d’hiver (et à l’heure d’été fin mars), s’il est habituel pour nous, ne l’est pas dans la plupart des pays du monde. Et s’il permet des économies d’énergie, il est majoritairement impopulaire chez les Français.
Pourquoi change-t-on d’heure ?
Le passage à l’heure d’hiver est d’abord le retour à notre heure « normale », correspondant au fuseau horaire en vigueur (GMT+1 pour la France). Le changement d’heure est donc conçu pour économiser de l’énergie l’été pour profiter des périodes de jour plus longues. Ainsi, une étude de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) publiée en 2010 (la dernière disponible sur le sujet) a montré que le passage à l’heure d’été (+1 heure) entraînait :
- une consommation d’électricité plus importante le matin, avec notamment un pic à 6 heures du matin (équivalent à 5 heures en heure d’hiver) ;
- une consommation beaucoup moins importante le soir, notamment entre 20 heures et 21 heures (équivalent à la période entre 19 heures et 20 heures en hiver).
Autrement dit, les foyers paient, en moyenne, un peu plus en électricité le matin mais économisent finalement le soir. Or une heure d’éclairage en moins permet d’économiser environ 10 centimes d’euros.
Des impacts négatifs ?
Selon un récent sondage OpinionWay pour Comprendre Choisir, les Français seraient majoritairement contre cette pratique du changement d’heure (54 %), contre un peu moins d’un sur cinq favorables (19 %) et un peu plus d’un sur quatre indifférents (27 %). Ils ignorent notamment que cela leur permet des économies (59 %) et mettent en avant un impact négatif sur « le sommeil, l’alimentation ou l’humeur » (75 %).
Ce dernier constat est régulièrement appuyé par des études sur l’impact du changement d’heure. La dernière en date, publiée en septembre, a été réalisée par la Commission européenne, qui écrit que « la santé peut être affectée par le changement de biorythme du corps, avec de possibles troubles du sommeil et de l’humeur ». En 2008, une étude suédoise publiée dans le New England Journal of Medicine, s’appuyant sur des statistiques du pays entre 1987 et 2006, constatait elle « une augmentation statistiquement significative du risque de crise cardiaque » dans la semaine suivant le changement d’heure, notamment celui d’été fin mars.
Evolution du risque de crise cardiaque après le changement d’heure
En 1997, un rapport du Sénat assurait que « le monde médical restait très partagé sur l’existence de troubles imputables à l’heure d’été » mais que « 19 % des médecins faisaient état d’une augmentation de la consommation de médicaments et singulièrement de tranquillisants, au moment du changement d’heure, encore qu’aucune étude scientifique ne peux l’attribuer à ce seul facteur ».
Parmi les possibles impacts négatifs, l’Association contre l’heure d’été double (Ached), qui milite contre le changement d’heure, évoque également « des augmentations des accidents de la circulation ». Elle invoque pour cela des chiffres de… 1976 , affirmant qu’il y a eu 661 morts sur les routes en plus lors de cet été là (s’entendant ici par la période d’avril à octobre) qu’en 1975.
Dans son rapport publié en septembre, la Commission européenne, qui a passé en revue plusieurs études sur le sujet, relève des « résultats souvent contradictoires » sur le sujet, certains rapports « suggérant que le changement améliore la sécurité routière » grâce à une meilleure visibilité à certaines périodes de l’année et de la journée , d’autres« démontrant une augmentation potentielle des accidents de la route à cause des troubles du sommeil ».
Qui applique le changement d’heure ?
L’impact sur les accidents de la circulation a été un des arguments pour que les autorités russes reviennent à l’heure d’hiver de manière permanente, après que le pays a cessé de changer d’heure en 2011 pour rester continuellement à l’heure d’été. Avant le vote de la loi actant ce retour, en juillet, des députés russes ont cité des rapports médicaux faisant état d’une augmentation des accidents de la route le matin et affirmé que l’heure d’été permanente créait « des problèmes de stress et de santé, en particulier pour les populations dans le nord de la Russie, où les matinées restent noires plus longtemps pendant les durs mois d’hiver ».
Avec la Russie, d’autres pays ont cessé en 2011 de changer d’heure, comme l’Ukraine et l’Egypte (où le changement a finalement été réintroduit en 2014). Au total, environ 70 pays dans le monde changent d’heure deux fois par an. Dans certains d’entre eux sous régime fédéral, les Etats ou provinces peuvent choisir de changer ou pas (au Canada ou en Australie, par exemple).
En Europe, le changement d’heure est harmonisé pour l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne depuis 1998, afin de faciliter communications et transports.
Depuis l’Occupation, la France est en « double heure d’été » entre mars et septembre
Contrairement à ce qu’on peut beaucoup lire, le tout premier changement d’heure en France n’a pas eu lieu en 1976, mais… en 1923, quand la loi du 24 mai de cette année a défini que l’heure légale était « avancée de soixante minutes du dernier samedi de mars à 23 heures au premier samedi d’octobre à 24 heures ». La France, alors alignée sur le temps du méridien de Greenwich (GMT), avait une heure de décalage avec l’Allemagne, située plus à l’est. Quand les troupes nazies ont envahi la France en 1940, elles ont instauré « leur » heure, pour des raisons pratiques.
A la Libération, le retour au fuseau GMT est prévu en deux temps par le gouvernement provisoire, par un décret pour revenir à l’heure d’été en avril, puis par un autre pour revenir à l’heure d’hiver à la fin de l’année. Mais le second passage sera finalement annulé pour une raison floue, maintenant la France à GMT+1 – autrement dit, l’heure d’été qu’elle avait avant 1939, d’où l’expression « double heure d’été » entre mars et octobre, quand l’Hexagone est à GMT+2. Le changement d’heure biannuel, lui, sera rétabli en 1976 par Valéry Giscard d’Estaing pour des raisons d’économie après la première crise pétrolière.
Source : le monde.fr